1/ Guillaume Loizillon : Sale Affaire (1999, CD Imposture TRACE 010) 2/ Charles Amirkhanian : RADII (1972, Source ubuweb) 3/ Dièse 440 : Le curé : (1981, 33t à paraître) 4/ Takehisa Kosugi : Catch Wave, extrait (1975, Source ubuweb) 5/ Tony Mottola : Kemo Kimo (1963, 33t Tony Mottola plays country & western) 6/ Charles Dodge : Speech song (1973, 33t 10+2 : American text sound pieces) 7/ David Caroll : Nola (1963, 33t Solo encores) 8/ Z’ev : Salts of heavy metals, extrait (1981, maxi 45t, Salts of heavy metal) 9/ Julien Blaine & Guillaume Loizillon : Calmar (1999, CD 3 contre 1, TRACE 009) 10/ Laurie Anderson : N.Y social_life (1977, 33t New music for electronic and recorded media) 11/ Gregory Whitehead : Ice Music (1997, Source ubuweb) 12/ Guillaume Loizillon : Logomanie (1999, CD Imposture TRACE 010) 13/ Jean François Pauvros : Trash (2007, CD Documents TRACE 026) 14/ Karlheinz Stockhausen : telemusik, extrait (1966, 33t Deutsche Gramophon) 15/ Guillaume Loizillon : fontière (2010, à paraître) 16/ Michael Nyman : Mozart (1981, 33t A day in october) 17/ Guillaume Loizillon : Géométrie (1985, inédit) 18/ Sun Ra : Sun ra meets Sun Ra, extrait (1987, John Cage meets sun Ra, Source ubuweb) 19/ Guillaume Loizillon : machinapenser (1985, inédit) 20/ Joel Hubaut : The-Beauty-In-Breathing, extrait (1992, Source ubuweb) 21/
Laurie Anderson : Time to go (1977, 33t New music for electronic and recorded media)
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Jours et heures de diffusion, semaine du 11 au 18 mars : 12h,18h, minuit, 7H puis jusqu’au 18 février, mêmes horaires.
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ENTRETIEN
TRACES
Guillaume Loizillon, Dominique Balaÿ, février 2010
Pour prolonger et éclairer sa playliste webSYNradio, Guillaume Loizillon a bien voulu se prêter à un entretien où il nous rappelle la nécessité de mener des explorations hors des situations figées et des contextes trop connus :
Dominique Balaÿ : La playliste comme point de départ du projet webSYNradio : s’il y a un sens négatif – pointé par exemple par Laurent Chambert dans son entretien « Playliste ou ne pas être » : la playliste comme puissant signe de ralliement mais qui appauvrit le jeu de l’échange et renforce l’uniformisation culturelle – quel pourrait être le sens positif d’un tel exercice ?
Guillaume Loizillon : Comme compositeur c’est intéressant d’interroger un objet comme la playliste. Il faut d’abord fuir la tentation narcissique qui consisterait à y introduire exclusivement son propre travail (je l’ai fait cependant en certains points). J’apprécie d’avoir à choisir dans un stock prédéfini (Ubuweb). Je fréquente moi-même ce site qui contient d’ailleurs certaines des réalisations de Trace Label. Par contre j’ai trouvé intéressant d’y adjoindre d’autres éléments, partant de l’idée de rareté, d’inédit et aussi dans la perspective globale d’une construction sonore cohérente. Je me suis demandé s’il ne fallait pas agir comme « passeur » à composer une playliste. Je crois qu’elle se doit ne pas être didactique et s’écouter un peu comme une composition ou à tout le moins une proposition d’écoute originale.
C’est pour cela que j’ai désiré monter les extraits venus d’Ubuweb, ainsi que d’ajouter d’autres éléments qui me semblent prolonger cette collection.
Dominique Balaÿ : Pouvez-vous présenter vos différentes pratiques musicales et artistiques ?
Guillaume Loizillon : J’ai une pratique musicale et artistique que j’essaye d’avoir ouverte et variée et dans la continuité de ma vie. Dans une dénomination générique, on pourrait qualifier mon travail de musique électronique ou de musique expérimentale : D’un côté, une définition par le dispositif instrumental et de l’autre par le genre, au sens de catalogage du terme. Les deux approches manquent évidemment leur cible. Je crois nécessaire de déployer dans le temps ma pratique pour en avoir une approche plus juste. J’ai une formation musicale académique et universitaire (j’enseigne d’ailleurs à l’université). À ce titre j’ai donc une spécialité , un « domaine de recherche » pour employer la terminologie universitaire : la synthèse sonore, la création avec l’ordinateur, et plus généralement les frontières entre les pratiques artistiques au cours du 20ème siècle et en ce début de 21ème . On le voit, un programme et une structure qui à la fois me nourrissent mais peuvent aussi risquer de me conditionner, d’où ma forte tendance à une revendication d’indépendance et à la tentative de fuir les dogmatismes. Le fond de ma démarche est sans doute cette confrontation avec différentes approches musicales ou sonores ainsi qu’avec d’autres disciplines artistiques.
À la fin des années 70 et au début des années 80, j’ai fondé, avec 3 amis musiciens et un ami photographe, un groupe de musique électroacoustique live, Dièse 440 : Synthétiseurs analogiques, bandes magnétiques, diffusion en multicanaux et projections d’images sur un ballon sonde (!). Ce groupe a été un véritable point de départ. Par la suite nous avons joué avec le saxophoniste Barney Wilen. Un CD est sorti en 2007 et un 33t du groupe seul est prévu pour 2010, trente ans après !! Avec l’un des membres de Dièse 440, Claude Micheli, j’ai rejoins par la suite Hektor Zazou pour une aventure avec le musicien Zaïrois Bony Bikaye, jusqu’au milieu des années 80. J’ai aussi travaillé avec un certain nombre d’autres artistes, des poètes sonores (dénomination générique et imparfaite mais commode), Jacques Donguy, Julien Blaine, Joel Hubaut,, des chorégraphes ,J_M Matos, la Cie V.M.T et en 2005, la Merce Cunningham Dance Company pour un « event » à l’Opéra de Paris.
Par ailleurs j’ai toujours parallèlement pratiqué seul, la musique en studio d’où je sors des réalisations réellement personnelles. Deux disques chez Trace Label et différentes participations à des projets collectifs. Les travaux de groupe ou les collaborations m’ont profondément marqué et sans doute permis d’acquérir un statut de « professionnel », ils constituent ma pratique et nourrissent mes réalisations individuelles. Sur le plan esthétique, je crois que les musiques « électroniques », dans le sens le plus large du terme, sont faites pour cohabiter avec les musiques instrumentales et avec les autres arts. Mon prochain disque est une série de séquences électro-acoustiques sur lesquelles j’ai demandé à différents instrumentistes solistes de venir improviser.
Depuis quelques années je développe également sur le site de Trace Label, des projets collaboratifs, comme Phono-Photo ou le Territoire qui explorent le réseau en tant qu’espace d’expérimentation. Ce mode de fonctionnement est pour moi appelé à se développer et sans doute à refonder l’idée même de label musical, où le disque comme tel est un instant du processus et non pas une fin en soi.
Enfin, dans ce panorama à la fois rapide mais que je sens déjà trop long, il faut prendre en compte mon activité d’enseignant chercheur qui me confère une position d’observateur, un contact permanent avec de jeunes créateurs et me pousse à poser une réflexion sur l’idée même de recherche et d’expertise.
Dominique Balaÿ : Dans votre travail (créations musicales, direction du label Trace), les notions de collaboration/participation/échange/coproduction/interaction semblent très importantes – d’ailleurs quelles notions priviligiez vous ?
Guillaume Loizillon : Avant toute chose, il faut préciser que je ne « dirige » pas le Trace Label. Le label est un projet qui regroupe 3 individus (longtemps 4) qui chacun y mènent des projets et des réalisations propres, en consultation avec les autres. Il y a parfois des projets menés de manière commune, principalement les réalisations collectives. Bien que parfois je le regrette, il n’y a pas véritablement de fonctionnement collégial mais plutôt une somme d’énergies indépendantes qui se fusionnent dans le label. À cet égard, la composition du label reste ouverte et peut accueillir des collaborateurs au gré des projets.
Concernant les mots qui précèdent, tous n’ont pas le même statut. La coproduction a des connotations fonctionnelles, l’interaction un rapport à la technique, souvent peu réfléchi, et qui conduit à des positions parfois dogmatiques : l’interactivité comme valeur en soi du fait de sa force technologique, sans que cet « inter » , ce qui réellement se constitue à l’intersection des disciplines, ne soit réellement questionné.
La collaboration et participation sont plus intéressantes dans la mesure où elles balisent plus strictement un cheminement créatif et fondent de véritables échanges et rencontres.
Dominique Balaÿ : Et ces notions de collaboration/participation/échange/coproduction sont elles premières: faire de la musique pour être ensemble ?
Sur un plan théorique, sur un plan pratique ?
Guillaume Loizillon : Il y a bien sur de cela, mais il faut aussi voir que ces modalités d’activités sont également toutes en rapport avec les redéfinitions techniques, sociales et politiques de ce que l’on appelle la culture , dans l’époque actuelle.
Ces moyens de fonctionnement me semblent intéressants dans la mesure où ils produisent effectivement et efficacement des réalisations et non pas seulement de la valeur éthique ou conceptuelle. Quand, il y a quelques années, j’ai travaillé avec Merce Cunnigham, j’ai eu ce sentiment de la force de l’efficacité du collectif. En effet, il n’y a eu aucune rencontre ni répétition préalable. Seule une définition stricte et assumée du projet et des échanges de courrier. Toutes les composantes (danse, musique, décors) sont préparées de manières séparées et ne se confrontent qu’au moment de la représentation, et tout cela fonctionne effectivement : respect du travail de chacun et fusion de l’ensemble dans le projet esthétique.
Le modèle du groupe rock ( au-delà de la stylistique) est fondateur également, mais il s’agit ici d’y adjoindre une dimension d’exploration des conditions mêmes de la création.
Le développement des techniques de communication, avec au centre Internet, oblige à cela. Il s’agit d’entrer dans ce débat d’une manière que je crois la plus intéressante que le terrain de la loi HADOPI ou autre pensée de la reconfiguration du modèle industriel et juridique, pour moi, sans grand intérêt en regard de la situation. Les deux parties prenantes de l’affaire ne m’intéressent ni l’une ni l’autre : les valeureux défenseurs de la création et du droit d’auteur et les consommateurs insatiables de l’identique sans cesse répété.
Dominique Balaÿ : Au cœur de vos pratiques, vous placez une affirmation d’indépendance : par rapport à quoi ? Au marché, aux institutions, aux ambiances et aux pressions de l’époque ? Aux catégorisations hâtives ? Comment assumez-vous cette indépendance ?
Guillaume Loizillon : Je suis bien conscient que l’on s’exprime toujours « depuis quelque part » et que la revendication d’indépendance est en grande partie un leurre. La question est, bien entendu, celle de l’influence des structures de détermination, qui ne sont jamais absentes. Que celles-ci s’appellent, « industrie culturelle », « ministère », « université », « académie » ou même « mouvance indépendante », je crois impossible d’y échapper. J’essaie alors d’articuler ma pratique selon la plus grande liberté possible en regard de ces modèles. La réponse, sans doute imparfaite, que j’y apporte consiste à penser que la création artistique est une réalité et qu’elle est en quelque sorte « trans structure ». Par contre, si ce plan esthétique est pensable, une indépendance en regard de celui-ci n’aurait que peu de sens et pourrait conduire à un véritable isolement.
L’idée d’indépendance est donc celle qui conduit le plus directement à une démarche « expérimentale » pris dans le sens d’aventure et de mise en acte de la pensée critique. Bien plus que celle d’expertise, je vois la démarche d’expérimentation comme composante d’un tel programme.
Dominique Balaÿ : Indépendance et pas autonomie ?
Guillaume Loizillon : L’autonomie, en matière de pratique artistique, je ne vois pas réellement ce que cela pourrait être. Je la crains même comme un chemin vers l’isolement. Il faudrait plutôt interroger la notion de minorité, qui peut se comprendre sur même plan que l’autonomie mais qui travaille le caractère social de groupe en regard du fait majoritaire.
Par ailleurs, l’autonomie, indique que l’on se rend absent à toutes les autres constructions sociales, politiques et esthétiques, ce qui me paraît, bien plus qu’illusoire.
Dominique Balaÿ : Question centrale : Au sein du label Trace, vous avez édité les poètes Julien Blaine, Charles Pennequin… Etes vous lecteur de poésie ?
Guillaume Loizillon : Question qui force à l’introspection. Je m’aperçois que la poésie, ou plutôt le poétique, est un fondement de ma manière d’analyser et de percevoir. L’élucidation par le poétique est aussi puissante que bien des approches scientifiques comme : – La pensée de la perception avec l’appareillage des neurosciences.
– Les sciences humaines appliquées à la lecture de l’art
Les « Correspondances » de Baudelaire, le sonnet des Voyelles de Rimbaud, « Zone » d’Appolinaire, l’ethnographie imaginaire d’Henri Michaux, fonctionnent pour moi comme des idéaux-types qui se développent également comme analyses. Les propositions oulipiennes, en plus du caractère jouissif, me paraissent toucher profondément la mécanique créative.
Jacques Roubaud est également une figure que je trouve stimulante dans ses propositions d’une poésie qui se fabrique en contiguïté de l’existence.
Je m’aperçois cependant, que finalement je ne lis qu’assez peu de poésie.
Les poètes sonores avec qui j’ai travaillé représentent une de cette nécessité du poétique, peut-être plus essentiellement je l’avoue, que le poème comme objet littéraire.
Dominique Balaÿ : J’aimerai vous soumettre une questions qui m’anime à l’occasion de ce projet de webSYNradio : comment peut on définir une pratique collaborative ? Ce qui revient à se demander comment est il possible d’évaluer une pratique collaborative ?
Guillaume Loizillon : Le paradoxe du projet collectif est qu’il doit être défini le plus strictement possible par un individu ou un groupe pour pouvoir s’étendre et s’articuler comme réellement un jeu de collaboration. Le modèle littéraire oulipien peut à cet égard servir de référent. Dans son exacerbation de la contrainte c’est le collectif qui émerge et avec lui la possibilité de l’invention démultipliée. Le texte de Georges Perec « La chose », sur le free-jazz est très intéressant à lire sur ce thème.
La question de l’évaluation est, souvent pour le pire, extrêmement à la mode. Si l’on ne se laisse pas piéger par ce mot dans son acception quantitative (la plus pernicieuse) c’est le développement dans le temps et dans l’espace qui donne une dimension à un projet collaboratif. La technique également est centrale dans cette mise place. C’est, je crois, l’utilisation la plus pertinente d’Internet que de le penser comme support de partage. Dans ce contexte, il faut aussi en imaginer des « échappées » :
– Concrétisation sur support à un moment donné (Livre, revues, CD, DVD …)
– Rencontre dans des lieux fédérateurs. A cet égard, le Société des Curiosités en réinventant la notion de « club » me semble apparaître comme un projet qui intègre pleinement cette situation.
Dominique Balaÿ : au plaisir d’une prochaine rencontre alors, pourquoi pas à la société de curiosités ! WebSYNradio se veut avant tout un espace d’échange et de réflexion. Seriez vous d’accord pour vous prêter à un échange avec Laurent Chambert (qui m’a signalé votre travail) et que webSYNradio/Droit de Cités pourrait relayer ?
Guillaume Loizillon : Je suis toujours prêt à dialoguer et développer des idées et des projets. Les débats esthétiques, dans ces temps de platitudes, me semblent du plus haut intérêt … politique.
Dominique Balaÿ : à bon entendeur, merci !
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ELEMENTS
Je suis né en 1957, et je vis et travaille à Paris. Compositeur et musicien intéressé par tous les autres médias, depuis trois décennies, je reste attaché à une certaine indépendance et toujours attiré vers des expériences, des recherches et des développements artistiques nouveaux : musiques électroniques, improvisation, poésie sonore, installations et rencontres interdisciplinaires avec des plasticiens ou des chorégraphes. Outre mon travail personnel, j’ai collaboré entre autres avec : « Merce Cunningham Dance Company », Barney Wilen, Joel Hubaut, Jacques Donguy, Hektor Zazou, Jean-Marc Matos, Valère Novarina …
Je désire pouvoir penser une continuité entre une certaine exigence théorique et esthétique et l’ouverture la plus large aux propositions artistiques de l’époque qu’elles opèrent depuis le champs institutionnel, industriel ou « alternatif ». Ce choix s’attache à affirmer que, dans le contexte actuel de la mondialisation et de la marchandisation généralisée, la musique peut encore se vivre comme un espace permanent d’expérimentation ».
Je suis également maître de conférence au département musique de l’université Paris 8. J’y dispense des cours sur la création sonore, sur les rencontres entre la musique et les différents arts.
Je suis co-fondateur de label indépendant TRACE Label spécialisé dans les musiques électroacoustiques, la poésie sonore et l’improvisation J’y développe également des projets participatifs en ligne : Phono-Photo, La Carte…
Trace label : http://www.tracelab.com/
Site de Guillaume Loizillon