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« One small step » , 2010

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La musique et sa réception subjective, une expérience de la solitude, sans la peur

La musique ou – entendre l’être vibrant dans son existence même, la vie au dedans d’elle, une expérience renouvelée de l’intime, de ce qui échappe en nous, à nous même, déborde les limitations de la compréhension, de l’image arrêtée. Dans un flux, dans son temps réel, l’amplification des sensations, l’excitation de la sensibilité, une forme de lucidité. La musique révèle des équilibres et déséquilibres intérieurs, l’infini des possibilités, l’aptitude à se faire entendre à soi et d’une certaine façon à l’autre. Il y a égalité dans l’acte d’écoute entre celui qui produit le son et celui qui le reçoit, l’appropriation manifeste avec la possibilité de faire sien une extériorité pourtant saisie au plus éloigné de soi. La prescription collective – un placage, la contrainte de l’écoute finalement toujours déjouée par l’aptitude à entendre seul. Quelque soit l’administration, l’organisation de sa réception, de son usage, de sa diffusion, l’attribution de ses fonctions, la musique demeure le lieu dédié d’un lien direct, partage, passage, l’expression de ce qui peut être ressenti, perçu, capté, de l’expérience singulière du corps et de l’esprit, du voyage immobile, de l’élastique détachement sans la rupture, de la distance, de l’éloignement possible, ailleurs.

Son détournement manifeste pendant les périodes sombres de l’histoire récente au profit de l’édification d’un sentiment de masse, la captation de sa puissance, tient à l’imposition de l’image – cliché, du mot d’ordre vociférant dans le vide – le silence qui suit, l’autoritaire annexion du bouleversement subjectif, une falsification de la mémoire suite à l’ouverture des esprits. Ainsi, l’extraordinaire détachement que nous procure la musique pour percevoir notre réalité sera souvent réapproprié, replié sur, récupéré par tout ce qui se passe avant et après son exécution, par toutes les imprégnations qui structurent nos vies, sociales, culturelles, ce que nous croyons savoir, ce que nous voulons penser, montrer, comparer, nos retours les pieds sur terre.

Parler de musique, une façon de se définir mais aussi de passer à côté, elle qui réside dans ses jeux, le déploiement de sa temporalité. La culture développe l’étendue de nos connaissances mais elle en fixe aussi les cadres qui orientent nos conduites. Elle est le reflet d’un collectif, d’un temps, elle donne ce vers quoi se diriger pour l’adaptation à une époque, à une société. Echanger, oui, autour de la musique est du plus haut intérêt politique, toucher d’une certaine façon à ce qui nous relie, rassemble ou éloigne mais aussi à la façon dont nous voulons vivre ensemble. Echanger autour pour interroger les réductions induites ou forcées aux formats des tubulures, contraintes technologiques, contrer la tendance de l’évaluation à la conformation, une version de l’adaptation à finalité positive distillée sans cesse à travers des modèles (dits) de réussite, l’intelligence réduite à sa dimension réactive, au tac au tac. La musique n’est pas pour autant l’expression d’un désir d’autonomie, elle répond à la nécessité d’une indépendance, au besoin d’un espace vital. Elle offre une distanciation, ses moyens, à l’intérieur des environnements vastes ou réduits voire coercitifs. Echanger autour, l’appel d’un renouvellement et la transformation des cadres de sa propre inscription, les moyens de son développement, de sa création, de sa diffusion.

# Laurent Chambert

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éclair [..] foule

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