Faut-il s’en émouvoir ? Certains, là-bas, suivent encore le Guide.
Derrière les hauts murs de leur ville, ils mettent au point ces armes que nous possédons depuis longtemps, avec lesquelles nous ne voulons plus jouer. Ils peuvent, dès lors, s’engager dans cette guerre qu’ils gagneraient peut-être – ils ne parviendront pas, lorsqu’ils franchiront leurs portes solides, hurlant dans cette langue que nous n’entendons plus (qui fut celle de nos pères, dont nous ne jurerions pas qu’il n’y a pas là qu’un cri, animal), à reconnaître leurs ennemis, s’ils les rencontrent ; car nous avons changé. Nous oublierons d’ailleurs leurs torts, s’ils acceptent d’abandonner leur masque, de disparaître dans la peau. Voilà bien longtemps, quant à nous, que nous n’acceptons plus pour guides
que des porteurs de bidons d’eau. Car nous lisons l’avenir dans les ouragans.
Révolution 134
Sapience avance. Sous peu, nous saurons imiter les tremblements de Terre.
Pour l’heure, essayons de comprendre ; tremblerait-elle de peur, ou signifierait-elle une colère ? demandent les traducteurs du peuple au Président. Ce dernier, c’en est un, pose son menton sur le poing, fronce les sourcils, et répond la voix grosse d’un oracle que ce n’est pas cette Terre à jamais immobile : mais c’est vous, gronde-t-il, c’est vous qui tremblez, lorsque mes soldats blancs tordent un bras au grand corps collectif qui vous contient, et que vous percevrez, bientôt, comme une prison. Nous rangeons nos micros, sans oser demander le nombre des cadavres qui, cette année, arroseront les sols d’un sang s’égouttant dans les grottes où l’uranium attend. Le sang
le salira, l’uranium. Le sang l’enrichira.